Dante Disparate (Circle) : “La France est de plus en plus vue comme leader dans la crypto”

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Le géant américain Circle, qui émet le stablecoin dollar USDC, a annoncé cette semaine qu’il allait installer son siège européen à Paris. Nous avons parlé des raisons de ce choix avec le responsable de sa stratégie, Dante Disparate.

Vous venez d’annoncer que Circle allait installer son siège européen à Paris. Pourquoi Paris et pas une autre ville européenne ?

Pour nous, il y avait plusieurs raisons de nous installer à Paris. Il y a d’abord l’écosystème qui est très dynamique à la fois dans la crypto, mais aussi dans les services financiers au sens large.

La volonté et le discours politique affichés ont aussi joué. Comme vous le savez, toutes les autorités françaises, jusqu’au président de la République Emmanuel Macron, sont très mobilisées, et c’est un point essentiel pour une entreprise comme Circle.

Y’a-t-il eu une rencontre directe avec Emmanuel Macron ou avec le ministre des Finances; Bruno Le Maire ?

Non, pas encore, mais nous sommes en contact avec eux. Nous serons très présents en France dans les prochains mois, et je pense que nous aurons l’occasion de les voir au cours d’un ou de plusieurs événements.

En tout cas, peut-être qu’en France, vous ne voyez pas les choses ainsi, mais de l’étranger, la France est de plus en plus vue comme un leader dans la crypto, à la fois en Europe, et même au niveau mondial.

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Comment votre implantation en France va-t-elle se matérialiser ?

Nous allons évidemment recruter, même si c’est difficile de dire aujourd’hui dans quel ordre de grandeur. En attendant, nous avons déposé notre dossier auprès de l’AMF pour devenir PSAN (prestataire de services sur actifs numériques) et également notre dossier d’établissement de monnaie électronique. Notre vision est d’importer notre euro numérique en Europe.

Aujourd’hui, vous gérez l’un des plus gros stablecoins de la planète. Quel est votre objectif à long terme ?

Il y a plusieurs manières de voir les choses, mais je tiens à préciser que nous n’aimons pas la notion de “stablecoin”, parce cela recouvre des réalités bien différentes. Nous n’avons rien à voir avec des stablecoins comme l’UST de Terra Luna. L’USDC est beaucoup plus un concurrent de Visa, Mastercard ou de PayPal.

Êtes-vous vraiment des concurrents de Visa et Mastercard ?

Oui bien sûr. Dans des zones comme l’Europe, où vous manquez d’alternatives à Visa et Mastercard, nous pouvons être une solution.

Pourriez-vous devenir un concurrent des monnaies numériques de banques centrales ?

Non, pas du tout, et c’est très amusant que vous y pensiez. Les monnaies numériques de banques centrales sont avant tout une réponse au projet Libra (le projet mort-né de monnaie numérique de Meta, ndlr).

Avant 2019 et ce projet, aucune banque centrale n’avait eu l’idée de créer une monnaie numérique de banque centrale. Aujourd’hui, il y a plus de 120 banques centrales qui travaillent sur ce genre de projet.

Nous ne sommes pas du tout concurrent de ces types de monnaies. Bien au contraire. Nous voulons simplement rendre la monnaie commerciale, c’est-à-dire la monnaie privée, plus efficace.

Est-ce que vous allez proposer des services financiers autour de l’USDC et de l’EUROC, votre stablecoin euro lancé en 2022 ?

Notre travail n’est pas simplement de veiller à la stabilité de nos stablecoins (USDC et EUROC), mais aussi d’augmenter leur usage au quotidien.

Aujourd’hui, l’USDC est compatible avec Visa et Mastercard, il est également intégré dans Moneygram. Nous sommes en train de faire la même chose avec notre stablecoin euro.

Quel est l’intérêt pour les acteurs financiers de travailler avec vous ?

C’est assez simple : pour la plupart des acteurs financiers, la crypto est un cauchemar parce qu’elle va les désintermédier. Et en un sens, ils ont raison d’avoir peur parce que les utilisateurs pourraient ne plus avoir besoin d’eux. Au moins en théorie.

Avec nous, c’est l’inverse. Nous sommes des partenaires des banques. Aux États-Unis, nous avons déjà 6 partenaires comme la BNY Mellon, qui est l’une des principales banques américaines. BNY Mellon garde une partie de notre réserve, surtout celle en cash, et BlackRock en garde une autre partie (le obligations souveraines, ndlr). Nous faisons partie d’une grande chaîne de valeur et nous voulons faire la même chose avec les banques européennes.

Que pensez-vous du manque clarté de la réglementation américaine ?

Vous savez, aux États-Unis, nous sommes plutôt du genre à répondre aux crises plutôt qu’à les anticiper. C’est ce qui s’est passé avec Internet : nous avons attendu l’explosion de la bulle au début des années 2000 pour réagir et établir des règles. Idem en 2008 avec la crise financière. Avec la crypto, c’est encore la même chose, et on sait que ça ne se fera pas facilement…

L’USDC a été touché par la chute de Silicon Valley Bank, qui détient une partie de vos réserves (3,3 milliards de dollars). Le stablecoin a perdu sa parité pendant 48h. Comment éviter que cela ne se reproduise ?

Honnêtement, c’est une expérience difficile, mais pleine d’enseignements.

Depuis des années, tous les régulateurs de la planète, de la Banque des règlements internationaux au Conseil de stabilité financière, sont obsédés par la crainte d’une contagion de la finance traditionnelle par la crypto. Or, ce que nous avons vécu ces dernières semaines est totalement l’inverse. Là, ce sont des banques qui ont impacté l’écosystème crypto, ce qui est quand même un comble.

Donc, oui, nous avons été affectés, mais nous savons gérer cela. Ce n’était qu’une perte de parité temporaire. Nous sommes toujours capables de rembourser n’importe quel dollar.

Est-ce que vous pourriez déposer l’intégralité de vos réserves auprès d’une banque centrale ?

C’est possible. Aujourd’hui, l’USDC c’est 20% de cash et le reste est placé en bons du Trésor américains de maturité courte. Nous avons une réserve très liquide.

La prochaine étape sera d’être régulé au niveau fédéral et potentiellement de déposer notre réserve auprès de la banque centrale américaine (Fed).

Vous avez arrêté il y a quelques mois le produit de rendement Circle Yield. Pourquoi ? Pourriez-vous le relancer ?

Yield a été une bonne expérience pour nous. Nous avons voulu tester ce produit, la demande, mais nous nous sommes lancés au moment où les marchés ont chuté, donc les clients n’étaient pas au rendez-vous.

Pourriez-vous relancer un tel produit ?

Tout va dépendre du contexte de marché.

Une majorité de la réserve de l’USDC est placée dans des bons du Trésor. Pourriez-vous faire pareil avec l’EUROC ?

C’est possible. Aujourd’hui l’EUROC ne représente que 32 millions d’euros, donc cela est encore relativement faible. Mais notre ambition est d’augmenter ces volumes, notamment en travaillant avec des banques européennes.

Discutez-vous avec des banques françaises ?

Bien sûr, nous sommes en pleines discussions. Mais nous voulons d’abord être régulées avant d’aller plus loin.

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Dante Disparate (Circle) : “La France est de plus en plus vue comme leader dans la crypto”
Publié le
Published on
March 22, 2023

Dante Disparate (Circle) : “La France est de plus en plus vue comme leader dans la crypto”

Le géant américain Circle, qui émet le stablecoin dollar USDC, a annoncé cette semaine qu’il allait installer son siège européen à Paris. Nous avons parlé des raisons de ce choix avec le responsable de sa stratégie, Dante Disparate.

Vous venez d’annoncer que Circle allait installer son siège européen à Paris. Pourquoi Paris et pas une autre ville européenne ?

Pour nous, il y avait plusieurs raisons de nous installer à Paris. Il y a d’abord l’écosystème qui est très dynamique à la fois dans la crypto, mais aussi dans les services financiers au sens large.

La volonté et le discours politique affichés ont aussi joué. Comme vous le savez, toutes les autorités françaises, jusqu’au président de la République Emmanuel Macron, sont très mobilisées, et c’est un point essentiel pour une entreprise comme Circle.

Y’a-t-il eu une rencontre directe avec Emmanuel Macron ou avec le ministre des Finances; Bruno Le Maire ?

Non, pas encore, mais nous sommes en contact avec eux. Nous serons très présents en France dans les prochains mois, et je pense que nous aurons l’occasion de les voir au cours d’un ou de plusieurs événements.

En tout cas, peut-être qu’en France, vous ne voyez pas les choses ainsi, mais de l’étranger, la France est de plus en plus vue comme un leader dans la crypto, à la fois en Europe, et même au niveau mondial.

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Nous allons évidemment recruter, même si c’est difficile de dire aujourd’hui dans quel ordre de grandeur. En attendant, nous avons déposé notre dossier auprès de l’AMF pour devenir PSAN (prestataire de services sur actifs numériques) et également notre dossier d’établissement de monnaie électronique. Notre vision est d’importer notre euro numérique en Europe.

Aujourd’hui, vous gérez l’un des plus gros stablecoins de la planète. Quel est votre objectif à long terme ?

Il y a plusieurs manières de voir les choses, mais je tiens à préciser que nous n’aimons pas la notion de “stablecoin”, parce cela recouvre des réalités bien différentes. Nous n’avons rien à voir avec des stablecoins comme l’UST de Terra Luna. L’USDC est beaucoup plus un concurrent de Visa, Mastercard ou de PayPal.

Êtes-vous vraiment des concurrents de Visa et Mastercard ?

Oui bien sûr. Dans des zones comme l’Europe, où vous manquez d’alternatives à Visa et Mastercard, nous pouvons être une solution.

Pourriez-vous devenir un concurrent des monnaies numériques de banques centrales ?

Non, pas du tout, et c’est très amusant que vous y pensiez. Les monnaies numériques de banques centrales sont avant tout une réponse au projet Libra (le projet mort-né de monnaie numérique de Meta, ndlr).

Avant 2019 et ce projet, aucune banque centrale n’avait eu l’idée de créer une monnaie numérique de banque centrale. Aujourd’hui, il y a plus de 120 banques centrales qui travaillent sur ce genre de projet.

Nous ne sommes pas du tout concurrent de ces types de monnaies. Bien au contraire. Nous voulons simplement rendre la monnaie commerciale, c’est-à-dire la monnaie privée, plus efficace.

Est-ce que vous allez proposer des services financiers autour de l’USDC et de l’EUROC, votre stablecoin euro lancé en 2022 ?

Notre travail n’est pas simplement de veiller à la stabilité de nos stablecoins (USDC et EUROC), mais aussi d’augmenter leur usage au quotidien.

Aujourd’hui, l’USDC est compatible avec Visa et Mastercard, il est également intégré dans Moneygram. Nous sommes en train de faire la même chose avec notre stablecoin euro.

Quel est l’intérêt pour les acteurs financiers de travailler avec vous ?

C’est assez simple : pour la plupart des acteurs financiers, la crypto est un cauchemar parce qu’elle va les désintermédier. Et en un sens, ils ont raison d’avoir peur parce que les utilisateurs pourraient ne plus avoir besoin d’eux. Au moins en théorie.

Avec nous, c’est l’inverse. Nous sommes des partenaires des banques. Aux États-Unis, nous avons déjà 6 partenaires comme la BNY Mellon, qui est l’une des principales banques américaines. BNY Mellon garde une partie de notre réserve, surtout celle en cash, et BlackRock en garde une autre partie (le obligations souveraines, ndlr). Nous faisons partie d’une grande chaîne de valeur et nous voulons faire la même chose avec les banques européennes.

Que pensez-vous du manque clarté de la réglementation américaine ?

Vous savez, aux États-Unis, nous sommes plutôt du genre à répondre aux crises plutôt qu’à les anticiper. C’est ce qui s’est passé avec Internet : nous avons attendu l’explosion de la bulle au début des années 2000 pour réagir et établir des règles. Idem en 2008 avec la crise financière. Avec la crypto, c’est encore la même chose, et on sait que ça ne se fera pas facilement…

L’USDC a été touché par la chute de Silicon Valley Bank, qui détient une partie de vos réserves (3,3 milliards de dollars). Le stablecoin a perdu sa parité pendant 48h. Comment éviter que cela ne se reproduise ?

Honnêtement, c’est une expérience difficile, mais pleine d’enseignements.

Depuis des années, tous les régulateurs de la planète, de la Banque des règlements internationaux au Conseil de stabilité financière, sont obsédés par la crainte d’une contagion de la finance traditionnelle par la crypto. Or, ce que nous avons vécu ces dernières semaines est totalement l’inverse. Là, ce sont des banques qui ont impacté l’écosystème crypto, ce qui est quand même un comble.

Donc, oui, nous avons été affectés, mais nous savons gérer cela. Ce n’était qu’une perte de parité temporaire. Nous sommes toujours capables de rembourser n’importe quel dollar.

Est-ce que vous pourriez déposer l’intégralité de vos réserves auprès d’une banque centrale ?

C’est possible. Aujourd’hui, l’USDC c’est 20% de cash et le reste est placé en bons du Trésor américains de maturité courte. Nous avons une réserve très liquide.

La prochaine étape sera d’être régulé au niveau fédéral et potentiellement de déposer notre réserve auprès de la banque centrale américaine (Fed).

Vous avez arrêté il y a quelques mois le produit de rendement Circle Yield. Pourquoi ? Pourriez-vous le relancer ?

Yield a été une bonne expérience pour nous. Nous avons voulu tester ce produit, la demande, mais nous nous sommes lancés au moment où les marchés ont chuté, donc les clients n’étaient pas au rendez-vous.

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Tout va dépendre du contexte de marché.

Une majorité de la réserve de l’USDC est placée dans des bons du Trésor. Pourriez-vous faire pareil avec l’EUROC ?

C’est possible. Aujourd’hui l’EUROC ne représente que 32 millions d’euros, donc cela est encore relativement faible. Mais notre ambition est d’augmenter ces volumes, notamment en travaillant avec des banques européennes.

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