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DeFi : Uniswap peut-il continuer à dominer le marché ?

DeFi : Uniswap peut-il continuer à dominer le marché ?

DeFi : Uniswap peut-il continuer à dominer le marché ?DeFi : Uniswap peut-il continuer à dominer le marché ?

‍La plateforme d’échange décentralisée (DEX) écrase la concurrence depuis quelques années, mais son absence de modèle économique pourrait progressivement lui faire perdre du terrain. Certains acteurs comme Curve pourraient en profiter.

Quelle est la part de marché d'Uniswap ?

Uniswap a connu une adoption rapide et une croissance exponentielle depuis son lancement 🚀.

Son modèle d'AMM a été salué pour sa simplicité et son accessibilité, permettant à quiconque de devenir un fournisseur de liquidités et de participer aux échanges décentralisés.

Sur l’ensemble des DEX disponibles sur Ethereum, sa part de marché atteint 88%, devant Curve (11%) et Sushiswap (1%).

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Ce qui fait en partie le succès d'Uniswap, ce sont ses frais relativement faibles par rapport à la concurrence : la plupart des autres projets prélèvent des commissions supplémentaires pour alimenter une trésorerie communautaire 💰.

Sur les sept derniers jours, son volume d’échange a tutoyé les 10 milliards de dollars, selon Dune Analytics (tous protocoles blockchain confondus cette fois).

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Il n’est pas rare que sa part de marché dépasse celle de Coinbase (deuxième plus grande plateforme d’échange centralisée du monde) sur certaines paires.

Si l’on prend le total des volumes d’échange hebdomadaires, Uniswap fait parfois jeu égal (ce qui est considérable) avec les plus gros.

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“Les plateformes centralisées sont plus simples à utiliser, moins chères et offrent souvent plus de liquidité, mais tous les tokens ne sont pas listés chez Binance, Coinbase ou leurs concurrents”, souligne Stanislas Barthélémi, expert crypto chez KPMG.

“Le grand avantage d’Uniswap, c’est que n’importe qui peut créer une pool de liquidité pour permettre l’échange d’un token”, insiste-t-il.

L’autre grande force de l’application, c’est son aspect “non-custodial”, c’est-à-dire que personne n’a le contrôle sur vos fonds, à la différence des acteurs centralisés à qui vous cédez la gestion de vos cryptos. “De nombreux intermédiaires centralisés ont été fortement chahutés voire ont disparu en 2022 (FTX, ndlr). En utilisant Uniswap, vous vous mettez à l’abri d’une fermeture inopinée”, insiste Stanislas Barthélémi.

Vu qu'Uniswap impose de gérer soi-même son wallet, le protocole est réservé à un public plus restreint que les acteurs centralisés. “Malgré son interface simple d’usage, les plus gros utilisateurs d’Uniswap ne sont pas des particuliers”, explique Mounir Benchemled, cofondateur de l’agrégateur de DEX Paraswap. “Ce sont surtout les Exchanges centralisés ou des agrégateurs comme nous”, insiste-t-il.

Comment Uniswap a-t-il évolué depuis 2018 ?

En mai 2020, Uniswap a lancé sa “version 2”, introduisant de nouvelles fonctionnalités telles que la possibilité d'échanger des tokens ERC-20 entre eux directement, sans avoir besoin d'ETH comme intermédiaire.

En 2021, Uniswap a lancé la “version 3”, apportant des améliorations supplémentaires à l'efficacité du capital et à la personnalisation des pools de liquidités.

“Cette mise à jour a été très importante, car, avant celle-ci, la liquidité pouvait être utilisée sur tous les prix possibles d’un token et cela limitait fortement l’efficacité du capital”, relève Stanislas Barthélémi. “Désormais on peut fixer une fourchette de prix à l’avance, ce qui rend le modèle beaucoup plus efficace”, souligne-t-il.

Le cas de la version 3 montre à quel point Uniswap est en pointe sur l’innovation. Quelques jours après l’expiration de la licence qui interdisait (pendant 2 ans) à quiconque d’exploiter le code de version 3, plusieurs concurrents (Sushiswap et PancakeSwap) l’ont immédiatement récupéré pour l’adapter à leurs solutions.

“Du côté des DEX, Uniswap est assurément le leader incontesté de l’innovation et de la communication”, abonde Mounir Benchemled.

Tout n’est pas rose cependant, car les acteurs qui apportent de la liquidité s’exposent régulièrement à des pertes en capital lorsqu’ils désirent retirer leurs fonds des pools de liquidité (on appelle cela “l’Impermanent Loss”).

Un problème pointé par Cyrille Pastour, cofondateur du protocole Swaap, qui offre un système permettant de supprimer cet inconvénient :

"De nombreuses études ont montré que déposer de la liquidité sur Uniswap de façon passive sur des paires d'actifs non corrélées impliquait des rendements en moyenne négatifs, avec une très forte variabilité. Dis autrement, déposer de la liquidité sur Uniswap est plus proche d'un pari que d'une stratégie d'investissement. Cela est dû aux modèles mathématiques utilisés par Uniswap ainsi qu'à l'absence d'utilisation d'oracles qui provoquent le redouté phénomène d'Impermanent Loss.”

Quel est le modèle économique d’Uniswap ?

À la différence de nombreux protocoles de finance décentralisée… il n’y en a quasiment pas 😅.

Lorsque vous utilisez Uniswap pour échanger des tokens, les frais de transaction que vous payez sont intégralement reversés aux pourvoyeurs de liquidité.

👉 Aucune rémunération n’est prévue pour alimenter la réserve de la DAO (organisation autonome décentralisée) à la tête d’Uniswap, à la différence de ce qui se pratique sur les applications de prêt décentralisé comme Aave ou Compound.

À court terme, le faible coût d’utilisation d’Uniswap est un vrai avantage, mais il présente quand même l’inconvénient de limiter, à long terme, ses revenus et donc ses moyens de développement.

“Uniswap a des volumes impressionnants, mais n’a jamais gagné le moindre centime”, constate Marc Zeller, spécialiste de la finance décentralisée et à tête d’Aave Chan Initiative, une plateforme de délégation au sein de la gouvernance du protocole de prêt décentralisé Aave. “Or c’est indispensable de gagner de l'argent, car les revenus gagnés par une DAO permettent de financer le protocole et aussi les fournisseurs de services”, note-t-il.

Il n’y a pas de solution parfaite : si Uniswap décide un jour d’allouer une partie des frais à sa réserve, cela diminuera la part réservée aux apporteurs de liquidité. Ces derniers seront alors incités à aller voir ailleurs et le protocole perdra mécaniquement des parts de marché.

À quoi le token UNI sert-il ?

Le token UNI est le token utilitaire du protocole Uniswap. Il a été lancé en septembre 2020 dans le cadre d'une distribution communautaire (airdrop).

Chaque personne qui avait utilisé au moins une fois Uniswap par le passé pouvait y prétendre. L’airdrop correspondait à 400 UNI, soit à l’époque à peu près 1300 euros Aujourd’hui, ce serait à peu près 2000 euros.

Ce token offre un droit de gouvernance. Ses détenteurs peuvent proposer des améliorations d’Uniswap, voter sur les propositions des autres, et globalement participer à la prise de décision concernant les évolutions du protocole. Chaque détenteur de token UNI dispose d'une voix pour exprimer ses préférences.

À terme, un milliard de tokens UNI seront en circulation. Voici le calendrier de vesting, c’est-à-dire de libération des tokens :

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Comment sa gouvernance s'exerce-t-elle ?

Uniswap se distingue de nombreux protocoles avec une gouvernance “on chain”. Chaque vote implique une transaction sur la blockchain et, lorsqu’une décision l’emporte, celle-ci est automatiquement implémentée dans le code.

Ce système est assez rare pour être souligné, parce que pour beaucoup de protocoles, il est nécessaire que les dirigeants se chargent d’appliquer “à la main” le résultat des votes.

Qui contrôle Uniswap ?

C’est le gros problème du projet : sa gouvernance est concentrée entre quelques mains et notamment des fonds de capital-risque américains, dont Andreessen Horowitz (a16z) ou Paradigm. À noter que, sans leur aval, rien ne bouge ! 👀

Avec la crainte d’une régulation américaine sévère à l’égard des cryptos, ces acteurs sont poussés à l’attentisme et de nombreuses décisions stratégiques ne peuvent être implémentées.

“Beaucoup aimeraient ajouter des frais de transaction pour rémunérer le protocole, mais aucune proposition n’est en mesure de passer”, souffle Marc Zeller. “Uniswap est clairement sous influence américaine et les membres de sa gouvernance s'apparentent plus à des actionnaires d’entreprises cotées en Bourse”, insiste-t-il.

Selon la justice américaine, une organisation autonome décentralisée (DAO) se rapproche légalement d’une association. Gravé dans le marbre du droit, ce postulat aurait de profondes implications pour ses membres 😅.

“Si un vote de gouvernance entraînait une requalification d’Uniswap en émetteur de titres financiers illégaux (comme cela pourrait potentiellement être le cas si des frais étaient prélevés pour alimenter une réserve), les votants pourraient être exposés à des sanctions américaines”, indique Mounir Benchemled.

D’où la frilosité des fonds à bouger sur les votes de gouvernance ; cette situation concerne de nombreux autres projets cryptos.

“Cette situation montre bien qu’Uniswap est encore loin d’être une DAO réellement décentralisée. Même si le token UNI a été distribué, il y a peu de propositions d’améliorations et on peut considérer que c’est l’une des DAO les moins actives de l’écosystème”, souligne Marc Zeller.

Quels sont les grands challengers d’Uniswap ?

En l’absence de fondamentaux économiques, avec des revenus pérennes, Uniswap va devoir bouger. Et en attendant, d’autres projets, dont la gouvernance est moins soumise aux craintes réglementaires américaines, vont pouvoir continuer d’innover et tenter de prendre des parts de marché.

“En termes de traction et d’innovation, Curve est un sérieux candidat depuis l’arrivée de sa version 2 qui permet d’échanger d’autres tokens que des stablecoins”, note Mounir Benchemled. En mars, Curve a enregistré, sur quelques jours, des volumes quotidiens de 10 milliards de dollars.

“C’est un protocole beaucoup plus complexe qu’Uniswap, mais il permet de faire pas mal de choses supplémentaires”, insiste-t-il.

Balancer ou Maverick font aussi figure de challengers.

“Le monopole d’Uniswap devrait s’éroder dans le temps et c’est une bonne chose”, avance Mounir Benchemled. “Pour le moment ils écrasent les volumes car ils ont été les premiers à se lancer dans le secteur des DEX, mais si demain un acteur a une proposition de valeur supérieure les utilisateurs n’auront aucun mal à migrer”, souligne-t-il. “De toute façon avoir un seul acteur dominant n’est pas sain”.

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