Incubateurs Web3 : lequel choisir ?

Dans l'univers entrepreneurial, il y a des mots qui claquent, qui impressionnent, et celui d'incubateur fait clairement partie du lot.

Venu tout droit des États-Unis, le concept d'incubateur s'est progressivement développé en Europe dans les années 2000, dans tous les secteurs de la Tech, et depuis la fin du Covid, on observe un phénomène similaire dans l'univers crypto.

Aujourd'hui, il existe plus d'une cinquantaine d'incubateurs Web3 et crypto en Europe, et presque une dizaine en France.

"Ces structures sont une alternative pour les entrepreneurs, surtout au moment où les fonds se montrent assez frileux", analyse Ivan de Lastours, responsable Crypto & Blockchain chez Bpifrance.

Reste qu’il n'est pas forcément simple de distinguer les incubateurs et de savoir ce qu'ils apportent respectivement aux start-ups qu'ils vont contribuer à créer et à accompagner.

C'est pour cette raison que nous avons décidé de les passer en revue !

Atka, l'expérience comme point fort

Présents dans l'écosystème depuis presque 10 ans maintenant 🤯, les trois fondateurs d'Atka (lancé en 2018), Pierre Laurent, William Piquard et Gabriel Rebibo ont décidé de lancer une nouvelle cohorte de projets Web3. Celle-ci vient tout juste de démarrer.

Atka a notamment accompagné Mangrove qui a réussi à lever 7,4 millions de dollars fin février dernier, et surtout Morpho Labs qui a de son côté bouclé un tour de table de 18 millions de dollars à l'été 2022.

Concrètement, leur modèle d'incubation/accélérateur se rapproche de celui en vogue aux États-Unis, très tourné vers l'objectif de la levée de fonds. Pour ce faire, Atka dispose d'une entité dédiée à l'investissement dans les projets incubés, capable d'allouer dans chacun des projets jusqu'à 250.000 euros, ainsi qu'un réseau de fonds de capital-risque partenaires qui ont fait leurs preuves.

Pour faire sa sélection, Atka auditionne une soixantaine de projets. Au final, l’incubateur en sélectionne au maximum 5 pour un programme de 6 mois. Durant ce programme, et selon des jalons établis avec chacun des projets, Atka déploie graduellement le capital alloué, en échange d'un pourcentage de tokens ou bien d'equity dans le projet.

"Auparavant, nous choisissions d'accompagner les projets un par un, au gré des opportunités que nous avions, mais c'est un modèle trop risqué et difficile à suivre pour notre réseau d'investisseurs", explique Gabriel Rebibo.

Pour gagner en efficacité, Atka a donc opté pour un système de cohorte qu’il vient de mettre en place, et qui est plus conforme au fonctionnement classique d'un incubateur. "Cela nous permet aussi de mieux structurer notre modèle qui pouvait auparavant paraître un peu artisanal", poursuit William Piquard.

Le modèle des Start-up Studios

Dans ce modèle, c'est le start-up studio lui-même qui endosse le rôle de co-fondateur pour lancer l'entreprise.

L’un des start-up studios Web3 en France est 3founders qui fait partie de l’écosystème Hexa.

Dans un premier temps, 3founders va sourcer les projets en rapport avec sa thèse d'investissement et va entièrement financer ses besoins jusqu'à sa première levée de fonds, généralement en seed. En contrepartie, 3founders va investir dans l'entreprise jusqu'à 30% en Equity. "Par la suite, l'entreprise reprend son autonomie", précise Florent Quinti, responsable de la partie Web3.

Ancien de chez Ledger, Ludovic Simon a fondé avec 3founders, la start-up RiverFlow, qui est spécialisée dans les données blockchain pour les entreprises. "Indéniablement, c'est le fait que Hexa soit spécialisé dans le produit destiné aux entreprises et que le modèle ait fait ses preuves depuis une dizaine d'années maintenant qui m'a poussé à rejoindre le programme", explique-t-il.

Mais le start-up studio le plus connu dans l'écosystème français est PyratzLabs, cofondé en 2021 par Bilal El-Alamy et entièrement spécialisé dans le Web3. "Avec mon expérience dans le Web3, j'avais une vision assez claire des besoins du marché, notamment en termes de Gaming", explique-t-il.

Pour chaque projet, PyratzLabs investit 500 000 euros ce qui lui donne entre 15% et 20% du capital de l'entreprise. Le start-up studio a notamment accompagné Dogami, sorte de Tamagotchi du Web3 qui a réussi à lever plus de 15 millions d'euros depuis janvier 2022. Billy, spécialisé dans les NFTs, et Bubblemaps, qui a récemment bouclé un tour de table de 3 millions d'euros, font partie des autres entreprises accompagnées.

Depuis cette année, PyratzLabs est sorti de son modèle uniquement tourné vers celui du start-up studio en lançant un programme d'accélération pour les entreprises déjà créées (comme Bubblemaps). Il a également lancé une offre à destination des grandes entreprises souhaitant développer des projets Web3 et IA 🤖.

Attention tout de même, ce modèle du start-up studio, qui implique une forte participation dans les entreprises, "peut contribuer à repousser les investisseurs pour une potentielle nouvelle levée de fonds", explique un responsable de fonds VC.

La logique d'écosystème avec H7 et iExec

Lancé en avril 2019, l'incubateur H7 situé à Lyon propose depuis septembre 2022 un programme d'accompagnement dédié au Web3. Sa particularité ? Il est totalement gratuit pour les entreprises qui, en l'intégrant, bénéficient d'aide en matière de marketing, de sourcing de financement ou encore de conseils pour développer leur business.

"Notre programme n'est pas conditionné à une prise de participation à la fin des 4 mois d'accompagnement", précise Kelly Green, start-up manager chez H7.

En contrepartie, les entreprises doivent accepter de collaborer avec iExec, spécialisée dans la vente de puissance de calcul, qui a lancé avec H7 l'incubateur uniquement à partir de fonds privés.

Une grande partie des experts mis à disposition pour le programme sont d'ailleurs issus de H7 ou iExec. L'intérêt pour eux est qu'à la suite du programme, les entreprises prometteuses intègrent leur écosystème.

Contrairement aux précédentes cohortes, celles de 2023 et 2024 n'intégreront que des entreprises au profil crypto-natif.

"Le Web3 est un secteur très particulier avec ses spécificités, notamment au niveau de la réglementation qui est très fluctuante. Il y a également des structures comme les DAO que l'on ne retrouve pas ailleurs", complète Kelly Green.

Cube3, le nouveau venu

Officiellement inauguré le 19 octobre à Angers, Cube3 est l'autre grand incubateur/accélérateur spécialisé dans le Web3 en région, entièrement lancé avec des fonds privés.

Pour son lancement, Cube3 va incuber ou accélérer une vingtaine de projets couvrant une large partie des thématiques Web3.

"Dès que le projet est sélectionné, nous prenons une participation qui n'excède jamais 10%. L'idée est de s'impliquer avec le projet pour ne pas transformer Cube3 en simple espace de co-working", explique l'un de ses co-fondateurs, Valentin Demé, actuel président de la structure.

Les entreprises doivent également souscrire à un abonnement mensuel qui permet de supporter une partie de la structure de coûts composée des ressources mises à disposition. "Il varie en fonction des entreprises et n'excède jamais 1 000 euros", précise Valentin Demé.

Enfin, Cube3 offre également un différé sur prestation pour les projets de manière à leur permettre de rembourser en 3 - 4 ans les prestations offertes par Cube3 lorsque l'un des objectifs, comme la levée de fonds, est atteint.

Cube3 n'a pas de branche VC directe mais travaille en partenariat avec Nebulae et Stake Capital.

"Nous avons également nos entrées aux États-Unis", assure Valentin Demé qui compte également sur sa bonne connaissance du territoire angevin pour convaincre des entrepreneurs locaux d'investir dans certains projets.

"Personnellement, je ne vois pas de points forts se dégager dans le modèle de Cube3 qui devra faire ses preuves", se montre prudent un bon connaisseur du secteur pour qui la multiplication des incubateurs est un signe de la structuration du secteur.