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Matej Žák (Trezor) : “On ne peut pas accepter que seuls 2% des détenteurs de cryptos aient un hardware wallet”

Matej Žák (Trezor) : “On ne peut pas accepter que seuls 2% des détenteurs de cryptos aient un hardware wallet”

Matej Žák (Trezor) : “On ne peut pas accepter que seuls 2% des détenteurs de cryptos aient un hardware wallet”Matej Žák (Trezor) : “On ne peut pas accepter que seuls 2% des détenteurs de cryptos aient un hardware wallet”

À l'occasion de son 10ème anniversaire, Trezor, le principal concurrent de Ledger, a lancé une nouvelle gamme de hardware wallets pour la première fois depuis 2018. Son PDG nous a accordé une interview lors de la conférence Bitcoin Amsterdam (12 & 13 octobre).

The Big Whale : Malgré le contexte globalement compliqué, il y a toujours autant d’événements. Comment trouvez-vous l'ambiance à Bitcoin Amsterdam ?

Matej Žák : L'intérêt pour le bitcoin va bien au-delà de son prix, donc l'ambiance est bonne! C'est agréable de se retrouver entre bitcoiners pendant quelques jours. Malgré le Bear Market, l'écosystème reste dynamique, et c'est toujours un plaisir de rencontrer des gens que l’on connaît et avec qui on a travaillé.

Vous évoquez la situation sur les marchés. Même si le bitcoin est repassé au-dessus des 30.000 dollars, les choses sont compliquées pour tout le monde... Et pour Trezor ?

Nous ne pouvons pas donner de détails sur notre situation financière, mais ce que je peux dire, c'est que les précédents Bear Markets ont été plus durs.

Quand j'ai rejoint l'entreprise il y a quatre ans, nous n’étions pas au mieux, c’était un Bear Market beaucoup plus compliqué. Aujourd'hui, nous continuons d'embaucher et nous avons les moyens d'investir dans de nouveaux produits. Le but de tout le monde est d'être prêt quand le marché va redémarrer.

Vous parlez d'embaucher. Quels sont aujourd’hui les effectifs de Trezor ?

Nous sommes environ 150, et nous visons 200 personnes d’ici 2025.

Vous venez d’annoncer la sortie de nouveaux produits. La dernière fois, c’était en 2018, autrement dit il y a une éternité à l’échelle du secteur. Pourquoi autant de temps et quelles sont les nouveautés par rapport aux wallets précédents ?

Créer des hardware wallets prend du temps tout simplement parce qu’on touche à un sujet très sensible qui est celui de la conservation des crypto-actifs, et nos nouveaux produits vont nous permettre d’être encore meilleurs.

Le premier nouveau produit est le Trezor Safe 3 qui permet de sécuriser près de 7.000 cryptos. Tout d’abord, nous avons intégré une fonction de récupération de type Shamir qui permet d’inclure des tiers de confiance dans le processus de transaction.

Mais la principale nouveauté est l’ajout d’un secure element à l’intérieur du hardware wallet. Il est destiné à limiter la surface d’attaque physique. Il protège votre code PIN qui vous permet d’accéder au portefeuille physique. La particularité, c’est que le Secure Element ne le mémorise pas.

Pourquoi n’aviez-vous pas intégré cet élément dans vos précédents wallets ?

C’est un niveau de sécurité supplémentaire que nous intégrons. Cela ne veut pas dire que nos précédents hardware wallets ne sont pas efficaces, mais les nouveaux sont encore plus sécurisés.

Globalement, le meilleur moyen de sécuriser l’accès à ses portefeuilles Trezor est de disposer d’une solide “passphrase” (sorte de mot de passe, ndlr) qui, via notre système, peut être composée des lettres et numéros de votre choix.

Maintenant que vous avez intégré un secure element, quelles sont les principales différences avec vos concurrents comme Ledger ?

Le fait que nos solutions de software soient complètement open-sources constitue la grande différence par rapport à Ledger.

Nous travaillons également pour rendre le plus open-source possible notre hardware wallet. En ce sens, nous n’avons signé aucun accord de confidentialité avec Infineon Technologies, le fabricant de nos secure elements, de façon à être totalement transparent si une vulnérabilité est découverte et surtout de pouvoir communiquer publiquement dessus.

De nombreuses entreprises choisissent de garder ce processus opaque. Ce n’est pas notre cas.

Pour célébrer votre 10ème anniversaire, vous avez également lancé un portefeuille physique dédié au bitcoin. Pourquoi ce choix ?

Pour nous, Bitcoin tient une place particulière dans l’écosystème crypto et nous voulions le rappeler. C’est une question à la fois philosophique et technologique. Bitcoin est une invention qui peut résoudre énormément de problèmes comme l’inflation ou l’inclusion financière.

Trezor fera don de 21 € sur chaque vente de Hardware wallet Bitcoin pour soutenir la Trezor Academy, une initiative d'éducation au bitcoin. Où allez-vous créer cette “Académie” ?

Nous espérons être présents partout dans le monde là où Bitcoin serait le plus utile, mais dans un premier temps, nous voulons déployer notre académie en Afrique.

Le but sera d’apporter un soutien aux bitcoiners locaux en mettant en place des cours, des rencontres pour éduquer les gens. Nous avons déjà de très bons contacts avec plusieurs pays africains.

Pourquoi avoir choisi l’Afrique ?

Sur ce continent, il y a beaucoup de problèmes liés à l’inflation ou à l’inclusion financière. Le bitcoin peut aussi être utile pour des opposants à des régimes dictatoriaux. Eduquer sur le bitcoin en Afrique fait vraiment sens.

Pour revenir aux produits, vous avez également lancé un système de phrase de récupération physique prenant la forme d’un tube de métal. Original…

Oui, l’idée du “Keep Metal” est de donner le plus d’options possibles à nos utilisateurs pour sécuriser leur seed phrase qui est souvent notée sur un simple bout de papier sans davantage de protection.

Avec notre nouveau système, vous pouvez à la fois graver votre seed phrase à l’intérieur du tube mais aussi y stocker du papier. Le “Keep Metal” est conçu pour être résistant au feu et à l’eau pour éviter au maximum les accidents. C’est une solution physique qui permet de ne pas stocker sa seed phrase sur Internet.

Cela ne fait-il pas un peu “gadget” ?

Non, pas du tout. C'est une option supplémentaire pour sauvegarder sa phrase de récupération. Nous voulons donner un maximum d'options à nos utilisateurs pour leur self-custody.

Le but est également d'avoir un système de récupération avec le moins de KYC (Know Your Customer) possible et qui prévient au maximum les potentielles fuites de données.

Sur le plan de la régulation, les choses évoluent beaucoup, à la fois en Europe avec MiCA et aux Etats-Unis où le gendarme boursier américain a fortement durci le ton. Êtes-vous impactés ?

Pour le moment, nous ne sommes pas impactés ni par ce qui se passe aux Etats-Unis, ni par la réglementation MiCA qui va commencer à se mettre en place progressivement.

Êtes-vous membre d'une association en Europe pour faire entendre votre voix si jamais la réglementation devait impacter votre activité économique ?

Nous ne sommes membres d'aucune association et pour le moment, nous n'envisageons pas d'en rejoindre une. De manière générale, nous voulons apparaître le moins possible sur la scène publique et politique.

Quels sont les principaux marchés pour Trezor ?

Aujourd'hui, les États-Unis représentent plus de 50% de nos ventes, et l'Europe un peu moins de 30%. Le reste est réparti à peu près équitablement entre l'Amérique du Sud, l'Asie et l'Afrique.

Au printemps, vous avez déclaré que vos ventes avaient subitement augmenté de près de 900% suite à la polémique liée à Ledger Recover. Sont-elles toujours en hausse ?

Nous avons effectivement observé un pic très important à ce moment, qui est retombé depuis. Aujourd'hui, nos ventes sont revenues aux niveaux d'avant la polémique liée à Ledger Recover au printemps.

Depuis le lancement de Trezor, combien de hardware wallet avez-vous vendu ?

Nous ne communiquons pas sur ce chiffre.

Vos nouveaux produits commenceront à être livrés à partir de la mi-novembre. Quel est pour le moment l’état des pré-commandes ?

Tous les hardware wallet Bitcoin ont été vendus en 24 heures. Pour les autres produits, nous avons déjà reçu quelques milliers de commandes.

Depuis un peu plus d'un an maintenant, certains de vos concurrents entendent développer des services pour les entreprises. Est-ce aussi votre cas ?

Non, nous voulons rester une entreprise entièrement tournée vers les particuliers. La vision et la mission de Trezor est de démocratiser la self-custody (conservation en propre, ndlr) et donc l'indépendance financière d'un maximum d'utilisateurs.

Nous ne voulons pas nous écarter de notre mission première, ce serait trop risqué pour nous.

Est-ce économiquement réaliste de rester uniquement focalisé sur le marché des particuliers ?

Nous en sommes convaincus. Selon nos estimations, il y a environ 400 millions de détenteurs de cryptomonnaies à travers le monde, et moins de 2% d’entre eux ont un hardware wallet, ce n’est pas possible.

Ce pourcentage pourrait doubler dans les cinq prochaines années. On peut aussi raisonnablement penser que le nombre d'utilisateurs de cryptomonnaies va également augmenter et donc, automatiquement, le marché de la self-custody avec.

Beaucoup considèrent que les wallets Trezor sont compliqués à utiliser. Partagez-vous ce point de vue ? Qu'allez-vous faire pour améliorer les choses ?

Au risque de vous étonner, je ne partage pas ce point de vue ! L'utilisation peut paraître compliquée parce que nous fournissons de nombreuses options à nos utilisateurs pour sécuriser leurs cryptos.

Nos nouveaux hardware wallets peuvent être initialisés en une minute à partir de deux boutons sur le boîtier. Nous avons également lancé notre application Trezor Suite pour faciliter au maximum le suivi des investissements en cryptos avec une expérience utilisateur simplifiée.

Depuis votre lancement, vous avez choisi de vous développer sans avoir recours à des fonds de capital-risque (VC). Allez-vous continuer ?

Oui, pour la simple et bonne raison que nous voulons rester les plus indépendants possible. Souvent, les entreprises qui reçoivent beaucoup d’argent de fonds doivent grandir très vite, ce qui peut avoir un impact sur la qualité de la production ou la culture d’entreprise.

Le Bear Market actuel l’a montré à de nombreuses reprises. Devenir une machine à cash ne nous intéresse pas. Nous voulons rester une entreprise qui grandit de manière saine.

Ambitionnez-vous de conquérir d’autres marchés prochainement ?

Aujourd’hui, notre siège social reste en République Tchèque où est également basée la plus grande partie de notre chaîne de production. Pour le moment, nous ne cherchons pas particulièrement à nous développer ailleurs, même si nous gardons un œil sur les États-Unis qui concentrent la majorité de nos ventes aujourd’hui.

En mai dernier, la compagnie Unciphered a révélé un moyen d'avoir accès à la seed phrase de vos wallets. Comment avez-vous corrigé le tir ?

Pour rappel, ce hack était une attaque physique. En général, si vous avez du temps et des ressources illimités, tout peut être piraté. Ce type d'attaque est réduit avec l'ajout dans notre Trezor Safe 3 du Secure Element qui, de plus, ne conserve pas la seed phrase.

Comme je l'ai rappelé à de nombreuses reprises, le meilleur moyen de sécuriser ses cryptos via nos hardware wallets est de disposer d'une Passphrase très solide.

Dans ce cas, le seul moyen d'avoir accès à vos cryptos est de vous voler ce mot de passe. De plus, ce vecteur d'attaque était connu depuis quelques années déjà et j'ai personnellement été un peu surpris que cette vidéo soit publiée à ce moment particulier.

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