Reading
TBW #37 : Le bluff de Binance sur le Proof-of-Reserve

TBW #37 : Le bluff de Binance sur le Proof-of-Reserve

TBW #37 : Le bluff de Binance sur le Proof-of-ReserveTBW #37 : Le bluff de Binance sur le Proof-of-Reserve

Retrouvez toutes les informations de la 37ème newsletter Premium de The Big Whale.

En quelques années, l’Afrique et ses 1,2 milliard d’habitants sont devenus l’une des zones les plus en vue en termes de projets et d’adoption. Les chiffres varient, mais il y aurait entre 40 et 60 millions de détenteurs de cryptos sur le continent, selon Chainalysis (à peu près 250 millions au total).

Les raisons de cette dynamique sont connues : à cause du manque d’infrastructures financières, les Nigérians, les Togolais et les Kényans se tournent vers les cryptos pour pouvoir payer, s’envoyer de l’argent, conserver leur épargne et développer leur business 🚀.

Et la tendance n’est pas prête de s’arrêter. La société américaine Strike vient d’annoncer le déploiement de ses services dans plusieurs pays d’Afrique (Nigeria, Ghana et Kenya).

Elle permettra de faire des transactions en s’appuyant sur le réseau Bitcoin et de réceptionner les fonds en monnaie locale, le tout de manière quasi-instantanée et presque sans frais.

D’autres projets sont dans les tuyaux et sortiront en 2023. The Big Whale ira évidemment les voir sur place 👀.

Dans l'univers Web3, on parle beaucoup de l'Europe ou de l'Amérique du Nord, mais le "nouveau continent" n’est peut-être pas celui que l’on croit.

THE BIG NEWS

NOS INFORMATIONS EXCLUSIVES 🔥

👉 Preuve de réserve : le bluff de Binance

Une “avancée”, un “progrès”... Depuis que Binance a annoncé qu’il allait mettre en place un système de Proof-or-Reserve (Preuve de réserve), une partie de l’écosystème ne tarit pas d’éloge sur la plus grosse plateforme d’échange de la planète. Les compliments sont d’autant plus fournis que la société dirigée par Changpeng Zhao, alias “CZ”, a fait savoir que le système serait audité par le cabinet Mazars. Mais qu’en est-il réellement ? Selon nos informations, le cabinet français n’auditera pas toute la réserve de la plateforme enregistrée dans de nombreuses zones de la planète - notamment en Europe. “Contrairement à ce qu’avance Binance, ça ne concerne qu’une partie des comptes de la plateforme”, explique une bonne source. L’audit partiel tient notamment au fait que l’organisation de l’exchange est “très complexe” et “peu lisible”, ajoute une autre source. Pas forcément très rassurant 😅.

THE BIG STORY

MakerDAO : La tentation de la finance traditionnelle

Le protocole a décidé récemment d’investir la réserve de son stablecoin, le DAI, dans des actifs traditionnels comme des obligations d’État américaines. Une décision qui est loin de faire l’unanimité dans la communauté.

👉 D’abord c’est quoi MakerDAO ?

MakerDAO est l'organisation autonome décentralisée (DAO) qui gère le DAI, le quatrième plus gros stablecoin dollar du marché (5 milliards de dollars de capitalisation). Le protocole a été lancé en 2018 sur la blockchain Ethereum.

À la différence des stablecoins centralisés comme l’USDT (65 milliards de dollars) et l’USDC (63 milliards de dollars), le DAI ne repose pas sur une réserve classique en dollars.

Sa valeur est “backée”, c’est-à-dire soutenue, par des crypto-actifs, ce qui n’est pas sans conséquence : pour assurer la stabilité de la réserve, il faut un mécanisme de surallocation au cas où les cours des crypto-actifs baissent.

Un exemple : il faut envoyer 1000 dollars d’ethers pour générer 500 DAI. Dans le cas où l’ether chute d’environ 50%, la garantie est liquidée sur les marchés, mais le DAI reste stable. Plutôt malin 🤓.

Ces derniers mois et pour faire face à la dépréciation continue des cours des cryptos, la réserve du DAI a été alimentée essentiellement par d’autres stablecoins (USDC, GUSD, USDP). Actuellement, le DAI est ainsi “protégé” par environ 7,7 milliards de dollars de cryptos placées en garantie par la communauté, qui est rémunérée pour cela.

Maker est rémunéré par la plateforme d’échange Gemini à hauteur de 1,25% sur les GUSD (le stablecoin dollar de Gemini) qu’elle détient si son solde est maintenu au-delà 100 millions de dollars. Selon les derniers chiffres, Maker détient 500 millions de dollars en GUSD.

Signe de la tendance, Maker discute également avec la plateforme Coinbase pour un prêt de 1,6 milliard de dollars en USDC contre un rendement de 1,5%.

Toutes ces décisions ont été votées par la communauté, c’est-à-dire les détenteurs du token de gouvernance MKR, dont le cours évolue autour de 600 dollars.

À la base MakerDAO n’avait pas prévu de faire travailler sa réserve ; son objectif est de maintenir la parité avec le dollar. Mais c’était sans compter le nouvel environnement macro-économique et la très forte concurrence des autres stablecoins…

👉  Une dépendance à l’USDC qui pose problème

Depuis 2020, la plus grande partie de la réserve de Maker a reposé essentiellement sur le stablecoin USDC (près de 50%) émis par la société américaine Circle. “Ce stablecoin a l’avantage d’être très liquide et régulé aux États-Unis, mais son poids est devenu trop important et ses rendements sont limités avec les nouvelles conditions de marché”, concède Sébastien Derivaux qui assure la gestion des risques chez MakerDAO.

Selon la société d’analyse financière Kaiko, la rémunération sur l’USDC dans le protocole de prêts Aave est passée de 2,3% à 0,6% en l’espace de seulement 15 mois. Résultat, MakerDAO a connu entre juillet et septembre son trimestre le moins rentable depuis au moins 2020.

Pour s’adapter, l'organisation explore d'autres options comme le fait d'investir dans actifs de la finance traditionnelle (le mot est lâché 😬). “Il y a d’autres manières de trouver du rendement“, confirme Sébastien Derivaux.

Cette décision intervient aussi dans un contexte où l’USDC est particulièrement exposé. Cet été, plusieurs de ses adresses ont été gelées après les sanctions américaines contre Tornado Cash, un outil qui permet d’anonymiser des transactions en cryptomonnaies. 

👉 Les obligations d’État américaines

Mais revenons aux actifs du “monde réel” dont parle Sébastien Derivaux. Début octobre, la communauté Maker a décidé de placer 500 millions de dollars dans des bons du Trésor américain à maturité courte, c'est-à-dire ”1 an".

Pourquoi ? Parce que les taux d'intérêt ont flambé et que MakerDAO peut en profiter. La rémunération des obligations américaines est passée de 0,04% à 4,7% en à peine plus d’un an ! Un système que son concurrent  Circle (qui émet l’USDC) a bien compris et utilise déjà massivement depuis des mois.

Maker a également mis en place d’autres montages. “Nous prêtons du DAI à des projets comme ceux de la Société générale (30 millions de dollars) ou de la banque américaine Huntingdon Valley Bank (100 millions de dollars)”, explique Sébastien Derivaux.

“Ces investissements ont pour but de financer des projets qui montrent que la DeFi a un impact positif sur la société”, poursuit-il. “Nous pourrions à terme se diversifier dans des obligations d’entreprises”, explique le Français qui concède toutefois que cela prendra du temps.

Et tant mieux, car ce basculement progressif vers la finance traditionnelle et sa “centralisation” n’est pas du goût de tous. “Maker va là où sont les rendements et en ce moment, ils sont dans les obligations d’État américaines”, explique un expert du secteur.

“Les gens commençaient à quitter la DeFi, il fallait que l’on soit en mesure de rester attractifs”, souligne Sébastien Derivaux. Et les produits de la finance traditionnelle sont en partie la solution. Au moins pour les mois qui viennent.

Dans une note parue mi-octobre, la société d’analyse Kaiko explique que cette décision est “bonne à court-terme”, mais souligne aussi qu’elle a un impact sur la dimension décentralisée du DAI et pose des questions sur le long terme.

Pour rassurer la communauté, ce pivot vers la finance décentralisée est censé être provisoire. Les investissements dans les actifs du “monde réel” devraient être limités à 25% de la réserve d’ici trois ans. “Cette date n'est toutefois pas gravée dans le marbre. Elle pourrait être repoussée en fonction de l’évolution de la régulation et des conditions de marché”, concède Sébastien Derivaux.

À terme (si tout se passe comme prévu), la réserve de Maker devra être uniquement composée d’ethers, la cryptomonnaie au cœur de l’écosystème Ethereum. “Le but est réaliser le plus de profits possible pour acquérir un maximum d’ethers et se passer de la finance traditionnelle”, explique Sébastien Derivaux.

“La détention d'ethers ou de tout autre actif décentralisé est le seul moyen de résister à la réglementation car les réserves seront hors de portée de toute sanction”, souligne Kaiko.

À date, les actifs traditionnels représentent les deux tiers des revenus de Maker, évalués à un peu d'un million de dollars par mois (4 millions de dollars au troisième trimestre, selon la société d'analyses Messari).

👉 Le dilemme de la centralisation

Alors que faire ? “J’entends les reproches” indique Sébastien Derivaux, mais personne n’a encore trouvé de solution entièrement décentralisée. S’il y en avait une, on l’aurait évidemment choisi."

Les projets qui sont restés exclusivement dans l’univers décentralisé ne sont pas au mieux. L’un des exemples les plus frappants est celui du stablecoin RAI. Actuellement, ses détenteurs sont exposés à des rendements négatifs de 6% 🫤.

“Ce qu’il se passe chez Maker est à mon sens l'illustration d’une DeFi à la croisée des chemins”, analyse Stanislas Barthélémi, expert crypto chez KPMG. “On se retrouve avec deux tendances contradictoires : d’un côté une DeFi qui ne veut aucun lien avec la finance traditionnelle et risque d'être marginalisée, et de l’autre une hybridation TradFi-DeFi qui engendre des risques vis-à-vis des régulateurs et qui renforce le caractère centralisé du DAI", souligne-t-il.

Pour lui, ce flou est entretenu par le cofondateur Rune Christensen : “Il a fait voter une proposition idéologiquement pure sur le long terme (se passer des actifs du monde réel et désancrage avec le dollar pour éviter la censure de Washington), mais qui n'est pas simple, voire impossible, à mettre en oeuvre et se heurte à la réalité.”

👉 Une gouvernance inadaptée aux enjeux ?

Rune Christensen aurait-il trop de pouvoir ? Ce qui est sûr c'est que le projet n'est pas suffisamment décentralisé dans les faits, notamment à cause de la non-participation aux votes de nombreux membres - des fonds de capital-risque et des plateformes d’échange qui refusent de prendre position pour raisons légales ou de neutralité.

Lors du dernier grand scrutin organisé fin octobre par la communauté, la voix de Rune Christensen représentait 74% des votes exprimés 😵💫. On a connu mieux niveau décentralisation !

“MakerDAO est l’une des plus anciennes DAO et fonctionne réellement sous cette forme depuis 2020, mais les modèles de gouvernance sont encore trop simplistes pour être résistants à des attaques de l'intérieur ou de l'extérieur dans ce qu'on appelle les DAOs, c’est donc un terme qu’il faut relativiser”, analyse Stanislas Barthélémi.

Le cas symbolique de MakerDAO a fait l’objet d’une analyse de Vitalik Buterin, cofondateur d’Ethereum, dans un long billet de blog publié le 5 décembre. “Le protocole et ses réserves financières n’ont pas été attaqués car la majorité des tokens MKR sont détenus par un groupe assez restreint qui n’est pas prêt à vendre parce qu'il croit au projet. Il s'agit d'un bon modèle pour le lancement d'un stablecoin, mais pas pour sa gestion et son développement à long terme. Pour que les stablecoins décentralisées fonctionnent sur le long terme, il leur faut une gouvernance décentralisée”.

CQFD.

👉 Vers un nouveau système ?

La communauté Maker s’est exprimée le 31 octobre en faveur de la proposition “End Game” proposée par Rune Christensen. Celle-ci prévoit de réorganiser Maker en une série de “MetaDAOs” qui développeront de manière autonome leurs propres modèles commerciaux.

Ces MetaDAOs fonctionneront en parallèle du protocole principal et devraient disposer de leur propre token de gouvernance.

“MakerDAO était devenu trop complexe, il fallait découper cet ensemble en plusieurs sous-parties”, explique Sébastien Derivaux. “On conservera la structure Maker Core au-dessus qui s’occupera de la supervision, tandis que les MetaDAOs se concentreront sur des applications plus concrètes”, poursuit-il.

Cette nouvelle organisation permettra de mettre en place de nouvelles incitations économiques afin d’attirer davantage d’utilisateurs. “Des mécanismes de yield farming (rendements à partir de cryptomonnaies) feront leur arrivée”, confirme Sébastien Derivaux.

Tous ces changements ne sont en tout cas pas sans conséquence sur le projet et son avenir. Selon nos informations, un schisme de la communauté qui se traduirait par un “fork” (séparation des opposants qui conserveraient le fonctionnement du protocole historique) n’est pas à exclure.

Même dans la DeFi, la tentation de la finance traditionnelle peut avoir un prix.

THE BIG FOCUS

“Stax” : le pari de Ledger pour devenir mainstream

Le leader mondial de la conservation d’actifs numériques vient de présenter son nouveau portefeuille numérique. L’objectif ? Toucher le grand public.

C’est ce que l’on appelle un secret bien gardé. Après des mois de travail à l’abri des regards, Ledger vient d’annoncer le lancement de son nouveau portefeuille numérique baptisé “Stax”.

Le produit a été présenté mardi à Paris lors de la désormais célèbre conférence annuelle de la licorne 🇫🇷 (Op3n) où The Big Whale 🐳 était. “C’est une étape importante dans le développement de Ledger”, a indiqué son CEO, Pascal Gauthier.

Pour ce projet, le leader mondial de la conservation d’actifs numériques a mis les petits plats dans les grands puisqu’il a travaillé avec… Tony Fadell. L’Américain de 53 ans est tout simplement le créateur de l’iPod, qui a fait le succès mondial d’Apple dans les années 2000.

“Lorsque Ledger est venu me chercher, j’ai d’abord réfléchi, explique Tony Fadell. Et puis après je me suis dis qu’il fallait y aller et inventer l’iPod de la crypto.” Rien que ça !

Un vrai défi pour Ledger

Contrairement aux précédents produits de Ledger - les Nano S et X - le Stax ne se présente pas comme une clé USB.

C’est une sorte de carte de crédit avec un double écran tactile (il accepte plus de 5000 cryptos) qui offre une surface plus importante et un usage plus simple que les Nano où il y a un petit écran et deux boutons.

“Le but de Stax est d’apporter la sécurité des Nano avec un usage plus simple pour le grand public”, souligne Charles Guillemet, responsable de la technologie chez Ledger.

Est-ce pour autant un gage de succès ? Loin de là et du côté de Ledger on sait que le pari est immense. Car si les ventes ont fortement progressé ces dernières semaines grâce à la chute de FTX - Ledger a dépassé les 6 millions de devices vendus depuis sa création - il faut que les utilisateurs s’emparent du produit. Et acceptent de payer 279 euros ; Le Nano X coûte 149 euros.

Le Stax tentera de faire oublier l’échec commercial du Ledger Blue, un wallet doté d’un écran sorti en 2016 qui n’a jamais rencontré son public. La faute, peut-être, à un design moins soigné et peu de fonctionnalités supplémentaires par rapport aux Nano. Et aussi au prix : comme le Stax, il était vendu 279 euros.

Plusieurs clients ont réagi à celui du Stax en expliquant que c’était “trop cher”. Les premiers Stax doivent arriver fin mars 2023. Du côté des investisseurs de Ledger, on se veut toutefois rassurants. "À son lancement, l’iPod a aussi été considéré comme trop cher et ça ne l’a pas empêché de devenir un énorme succès.”

Il a toutefois mis deux-trois ans avant de vraiment décoller.

Tout ce qui compte en Web3. Chaque semaine.
25€/mois
12.5€/mois
Offre disponible jusqu’au 30.04.2024. 30 jours d’essai gratuit.
S'abonner
Tout ce qui compte dans le web3.
Les meilleurs news et analyses cryptos. Chaque semaine. 100% indépendant.
S'abonner
Dans cet article
No items found.
Prochain article
No items found.
Dans cette catégorie
No items found.