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TBW #36 : L'illusion de la "Proof-of-Reserve"

TBW #36 : L'illusion de la "Proof-of-Reserve"

TBW #36 : L'illusion de la "Proof-of-Reserve"TBW #36 : L'illusion de la "Proof-of-Reserve"

Retrouvez toutes les informations de la 36ème newsletter Premium de The Big Whale.

L’idée de cette preuve est de permettre à chaque client de consulter à un instant T les actifs détenus par une plateforme. “Ce système permettra à tout le monde de vérifier que Binance détient bien les cryptos”, a expliqué son patron “CZ”.

Sauf qu’aussi intéressant soit-il, ce système est (très) loin de régler tous les problèmes qu'ont soulevé le scandale FTX.

Consulter la réserve d’une plateforme ne donne qu’une idée partielle de sa situation financière. Quid de ses dettes ? Et comment s’assurer que la plateforme ne transférera pas les cryptos juste après l'opération ? 🤔

S’ils veulent vraiment rétablir la confiance, les exchanges vont devoir en faire bien plus et peut-être commencer par vraiment séparer leurs activités de conservation de celles de trading…

THE BIG NEWS

NOS INFORMATIONS EXCLUSIVES 🔥

👉 Dogami signe une nouvelle levée de fonds

Le crash de FTX n’empêche pas la planète crypto de tourner. Certains projets continuent de se développer (on en parle plus bas) ET de lever des fonds. C’est le cas de Dogami. Après plusieurs mois de négociation et un quasi-accord avec White Star Capital - on vous en parlait cet été, la start-up parisienne a finalement signé avec le fonds XAnge et d’autres investisseurs comme Bpifrance. Le total de la levée de fonds se situerait aux alentours de 7 millions d’euros. Dogami est un jeu NFT qui consiste à adopter et élever des chiens virtuels (il y a plus de 300 races 🐶) dans le but de gagner de l’argent via la crypto "Doga" et de jouer à d’autres jeux de la galaxie Dogami. Avec cet argent frais, la start-up parisienne, qui a déjà levé un peu plus de 5 millions d’euros début 2022, voudrait accélérer les recrutements et la création de nouveaux jeux.


THE BIG STORY

Et si l’écosystème ne s’était jamais aussi bien porté ?

Sauf à vivre sur une autre planète, personne n’a pu échapper à la chute de FTX. Elle a fait la Une des journaux, tournée en boucle à la télé et à la radio, une avalanche d’infos qui donne l’impression que tout l’écosystème est en ruines. Mais qu’en est-il réellement ? On a mené l’enquête 🔎.

Faites le test autour de vous : demandez “comment vont les cryptos” à un ami, à un collègue, à un proche, à qui vous voulez. Leur réponse sera presque la même.

Sur le ton curieux : “C’est un carnage là, non ?”

Sur le ton concerné : “Ah oui, c’est très très très très chaud”

Sur le ton péremptoire : “C’est fini les cryptos”

Depuis trois semaines, les médias ne parlent QUE de la chute de FTX et de ses conséquences. L’équipe de The Big Whale n’a jamais été autant sollicitée pour commenter une affaire qui, à force de sujets à la télé, à la radio, donne l’impression que tout l’écosystème s’est effondré... 🤯

Mais est-ce vraiment le cas ?

Si les marchés ne sont pas au mieux - le bitcoin évolue sous les 17.000 dollars - l’industrie résiste en réalité plutôt bien. “Il ne faut pas se tromper. Ce n’est qu’une partie de l’écosystème qui est touchée”, résume Alexandre Stachtchenko, directeur blockchain & cryptos chez KPMG France.

Cette “partie” de l’écosystème, c’est celle des intermédiaires financiers qui permettent d’acheter et de vendre des crypto-actifs. Avec la hausse fulgurante des cours depuis 2020, les plateformes comme FTX ont vu leur activité exploser au point de prendre une place démesurée 🚀

Le leader mondial, Binance, a franchi en 2021 le cap des 100 millions de clients, un chiffre qui ferait pâlir d’envie n’importe quelle banque. À titre de comparaison, la plus grande banque européenne, HSBC 🇬🇧, compte “seulement” 40 millions de clients.

Mais le retournement brutal des cours début 2022 a fragilisé cette belle mécanique, et les dominos ont commencé à tomber. D’abord au printemps avec Terra (Luna), puis avec Celsius, jusqu’à la chute de… FTX.

Comme l’a rappelé le patron de Binance, “CZ”, plusieurs plateformes et sociétés de prêts en cryptos vont encore “disparaître”. L’Américain BlockFi vient, par exemple, de mordre la poussière. Il a annoncé cette semaine qu’il se mettait sous la protection du chapitre 11 qui encadre les faillites aux États-Unis. Tous les regards sont aussi tournés vers Genesis - filiale du géant américain Grayscale - qui pourrait basculer et encore un peu plus accentuer la crise…

En attendant, tout va “plutôt” bien dans le reste du secteur 😅 

👉 Le boom du self-custody

Il y a d’abord les “bénéficiaires” directs de la fragilisation des exchanges, même s’ils refusent évidemment cette étiquette. C’est notamment le cas du français Ledger. “Nous n’avons jamais vendu autant de Nano”, confirme son CEO, Pascal Gauthier.

Depuis la chute de FTX, le leader mondial de la conservation d’actifs numérique vend des dizaines de milliers de produits par jour - contre quelques centaines ou quelques milliers au mieux en temps normal.

En novembre, la société valorisée 1,5 milliard de dollars a dépassé les 5,5 millions de hardware wallets vendus depuis sa création.

Les autres spécialistes de la conservation d’actifs numériques sont, eux aussi, en forme. Fireblocks, qui propose du MPC (calcul multipartite), c’est-à-dire une solution de conservation d’actifs cryptos sans hardware, a vu son volume d’affaires progresser.

“L’activité est très résiliente. Nous avons beaucoup de nouveaux clients qui ont compris l’importance du self-custody”, confirme un porte-parole de la société américaine.

👉 La DeFi en forme

Même son de cloche du côté de la finance décentralisée, où on insiste sur les vertus d’un système plus transparent et auditable. “La DeFi ne résoudra pas tous problèmes, mais ce qui s’est passé ces derniers mois est clairement un accélérateur", martèle Julien Bouteloup, fondateur de StakeDAO et membre de l’équipe de développement du protocole DeFi Curve.

Mi-novembre, le niveau des fonds déposés sur le protocole de DeFI Morpho 🇫🇷 a dépassé les 250 millions de dollars, soit plus que sur Solana, qui est impacté par la chute de FTX (retrouvez notre enquête).

Un point de vue partagé par d’autres acteurs de la DeFi. “Rien de tout ce qui s’est passé avec FTX n’est possible avec Aave ou Coumpound”, souligne Laszlo Szabo, cofondateur et CEO de Kiln, une société spécialisée dans le staking.

Signe de la tendance, Kiln vient de lever 17 millions d’euros dans le cadre d’une série A auprès de plusieurs acteurs de poids comme Kraken Ventures. “La valeur des actifs que l’on gère a diminué avec le Bear Market, mais jamais nous n’avons eu autant de demande”, ajoute Laszlo Szabo. La start-up parisienne gère désormais un peu plus de 600 millions de dollars de cryptos. Un record.

👉 Une période de maturité

Kiln n’est pas la seule entreprise à avoir levé des fonds. Comme on l'a indiqué plus haut, Dogami a aussi levé un peu moins de 10 millions d'euros.

Selon les derniers chiffres de l’organisation Crypto Valley Venture Capital (CVVC), l’écosystème européen a levé au total 1 milliard de dollars au troisième trimestre, soit autant que sur le premier trimestre 2022 et légèrement moins qu’au deuxième trimestre (1,4 milliard de dollars) 💶.

De fait, jamais les fonds crypto n’ont eu autant d’argent. Ils sont juste encore un peu plus sélectifs. “Il faut laisser les choses retomber et revenir à des valorisations plus réalistes”, explique Luc Jodet, responsable du fonds Web3 & Crypto chez XAnge.

Ce type de période est en effet propice à une sorte d’assainissement du secteur. “On a vu passer tout et n’importe quoi pendant deux ans, et la crise va permettre de faire le ménage”, confirme de son côté un business angel crypto. “Le Bear Market va faire son oeuvre et les clowns vont partir”, souligne un autre.

Le secteur des NFTs est de ce point de vue l’un des plus significatifs.

Le marché a littéralement explosé en 2021 avec de nouvelles collections qui se lançaient chaque semaine. Si certaines, comme les Bored Ape (retrouvez notre enquête), ont réussi à se faire une belle place, d’autres ont presque disparu de la circulation.

“Le secteur est en train de mûrir. Il y a une sorte de frénésie, mais la récente baisse n’a en rien entamé la dynamique. Il y a toujours autant de projets et de plus en plus d’acteurs sérieux”, explique Lucie-Eléonore Riveron, directrice de la NFT Factory à Paris.

Le signe d’un secteur en bonne santé 🔋.

THE BIG FOCUS

Matthias Baccino (Trade Republic) : “L’intérêt des investisseurs traditionnels pour les cryptos ne cesse de grandir”

TDC


Le responsable France de l’application d’investissement allemande (2 millions d’utilisateurs) revient sur le lancement de son offre crypto.

The Big Whale : Le marché des cryptos tangue beaucoup depuis quelques semaines. Était-ce le meilleur moment pour se lancer ?

Matthias Baccino : Le contexte actuel est très intéressant. Le crash de FTX a mis l’accent sur les questions de sécurité dans les cryptos, et nous voyons bien qu’il y a différents types d’acteurs. Ce qu’il s’est passé avec FTX n’aurait jamais pu arriver avec Trade Republic.

Nous faisons de la conservation, mais selon des standards qui n’ont rien à voir. Nos comptes sont audités par le gendarme financier allemand (BaFin) et la banque centrale allemande (Bundesbank). C’est une preuve de réserve assez crédible (rires).

À qui s’adresse votre offre ?

À tout le monde, mais surtout à ceux qui veulent investir dans les actifs numériques sans pour autant s’exposer aux risques de l’univers du Web3. L’intérêt des investisseurs traditionnels pour les cryptos ne cesse de grandir, mais certains redoutent de conserver eux-mêmes leurs cryptos, d’où notre solution.

Qu’attendiez-vous pour vous lancer ?

Nous attendions l’enregistrement de notre service de conservation d’actifs numériques (Trade Republic Custody) auprès des autorités autrichiennes. C’est désormais le cas, et nous pouvons proposer à nos clients d’investir dans 50 cryptomonnaies différentes.

Ce service était déjà disponible en Allemagne, en Espagne et en Italie, et il l'est depuis cette semaine dans neuf autres pays d’Europe : la France, la Belgique, l’Autriche, l’Irlande, la Lituanie, la Lettonie, le Portugal, la Slovaquie et la Slovénie. D’autres vont suivre.

Quelles leçons tirez-vous de vos premiers tests en Allemagne, en Espagne et en Italie ?

Nous nous sommes lancés en partenariat avec Bitgo pour la conservation des actifs numériques, mais nous avons finalement préféré développer notre propre solution pour une sécurité optimale.

Pourquoi avoir choisi l’Autriche pour enregistrer votre structure de conservation ?

En attendant l’entrée en vigueur de MiCA (la future réglementation européenne qui arrivera en 2024, ndlr), la réglementation autrichienne est la plus intéressante pour se développer en Europe. Elle est à la fois stable et assez détaillée, donc sécurisante. Les délais d'enregistrement courts ont aussi joué en la faveur de l'Autriche.

Les cryptos que les clients achètent sont-elles de “vraies” cryptos ? Beaucoup d’acteurs traditionnels proposent des produits synthétiques…

Oui, ce ne sont pas des produits synthétiques. Nous achetons et vendons à nos clients de “vraies” cryptos.

Pourquoi ne proposez-vous pas de dépôt/retrait de cryptos via des wallets externes ?

C'est un très gros challenge en termes de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Un tel système nécessite des développements informatiques importants ainsi qu’un marché européen harmonisé. C’est aussi le but de MiCA.

Nous allons travailler sur cette solution l’année prochaine afin que cela soit disponible le plus vite possible. Nous voulons permettre ces transferts tout en conservant notre niveau d'exigence en tant qu'entité financière régulée.

Sur quelle plateforme d’échange institutionnelle achetez-vous vos cryptos ?

Nous travaillons avec Bankhaus Scheich Wertpapierspezialist AG qui est le plus gros acteur allemand. Comme pour les actions et les ETF (Trade Republic travaille HSBC, ndlr), nous avons choisi ceux que nous considérons être comme les meilleurs.

Comment comptez-vous vous distinguer de Bitpanda et Revolut, qui proposent aussi de l’investissement crypto en parallèle d’autres placements plus traditionnels (actions, métaux précieux, etc.) ?

Bitpanda n’est pas vraiment un concurrent dans la mesure où ils ne vendent pas de vraies actions. Et concernant Revolut, nous aimons mettre en avant le fait que nous sommes régulés en Allemagne (la banque britannique est enregistrée en Lituanie pour ses clients européens, ndlr).

Comment assurez-vous la sécurisation des cryptos ?

Nous avons choisi la solution logicielle de Fireblocks qui est une référence dans l’écosystème (on vous en reparle très bientôt dans The Big Whale 👀). C’est très rassurant pour les clients, car ni Fireblocks, ni Trade Republic, ne sont en mesure de toucher à vos cryptos.

FTX disait la même chose… Comment le prouver aux utilisateurs ?

Dès que nous aurons des réserves suffisantes sur Trade Republic Custody, nous publierons des audits de nos comptes. Notre avantage, c'est que nous appartenons à la finance centralisée et que nous travaillons aussi avec des tiers de confiance : la banque centrale allemande et nos auditeurs, qui garantissent nos fonds.

On ne peut pas faire plus sécurisé qu’une banque européenne. C’est tout l’intérêt d’un modèle hybride comme le nôtre qui réunit, selon nous, le meilleur des deux mondes.

Que pensez-vous du concept de “preuve de réserve", notamment proposé par Binance ?

Je suis convaincu par la puissance offerte par la transparence des technologies blockchain. Néanmoins je suis banquier et je pense que nous avons besoin d’une confiance systémique, d’où l’intérêt de la future réglementation européenne MiCA. Les régulateurs et leur pouvoir de contrôle peuvent être aussi une partie de la solution.


Cette édition a été préparée avec ❤️ par Raphaël Bloch et Grégory Raymond. The Big Whale est un média libre et indépendant. En nous soutenant, vous participez à son développement.

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